De formes et d'humour

Alain Doret habille l’Espace Vallès d’une fantaisie qui touche à l’essence de la recherche artistique. Entre douce moquerie et hommage coloré à l’histoire de la peinture : l’exposition se vit avec une bonne humeur singulière. Laetitia Giry

L’entrée pourrait bien en décontenancer plus d’un : une impression de vide et de hauteur se mêle à l’étonnement provoqué par la proposition de l’artiste. Ce dernier a choisi de déterminer sa pratique artistique par un dictionnaire de formes trouvées dans des documents techniques. Joints d’étanchéité et autres pièces mécaniques prêtent leurs silhouettes à un artiste affirmant qu’il « ne crée rien, n’imagine rien », tout « prenant sa forme ». Une modestie coquette qui s’accorde bien avec son œuvre, foncièrement novatrice. « Formelles dans leur aspect physique » mais « très ouvertes, permettant une possibilité d’investigation » : ces formes vides de symboles, extraites de leur nature pratique, sont dupliquées et prolifèrent dans d’heureux contrastes de couleurs. Objets de recherche plastique, elles sont formes créatrices de formes, évoquant le potentiel d’auto génération de l’art. Le procédé n’a donc rien d’anodin. Et si les tableaux naissent à l’occasion des formes, leur disposition se fait à l’occasion du mur, entre motifs purement décoratifs se rapprochant d’une recherche de papiers peints propre au design, et exploration de la matière peinture.L’absolu artistique
A l’étage, s’offrent à nous des espaces confinés par le médium couleur : rose malabar, noir et blanc ou bleu pétrole moucheté de formes jaunes. Les tableaux présentés s’appréhendent ainsi en rapport au cocon qui les accueille. Incarnations de la remise en perspective de la peinture classique, ces tableaux représentent des scènes religieuses décalées et des natures mortes fluo à la modernité criarde. Des revisites de la tradition picturale et esthétique qui s’imposent comme un pied de nez aux peintres de l’époque et au désintérêt contemporain pour la forme peinture. En témoigne le gros plan sur le chien tenant dans sa gueule un faisan mort : nous voyons là une parodie de ces scènes de chasse autrefois peintes avec respect, distance et admiration, dont Alain Doret se rit pour mieux les célébrer. La moquerie, spectre constant dans ses réactualisations, se distingue avec une élégance narquoise dans le titre d’une œuvre : « Chapeaux Piero ». Son double sens - admiration pour le peintre de l’oeuvre d’origine (Piero della Francesca) exprimée de manière familière, et rappel du motif de la forme qui sert de chapeau aux personnages du cortège - souligne la force du travail de l’artiste, humour et audace en tête. F3D Alain Doret
Jusqu’au 20 février, à l’Espace Vallès

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