Au fond Dujardin

Portrait / Dans Rio ne répond plus, une séquence montre l’art éclatant de Jean Dujardin quand il s’agit de créer physiquement un personnage de pur burlesque : il traverse une pluie de balles en se tenant légèrement accroupi, avec son bras droit au-dessus de son visage comme seul bouclier. On se souvient alors que ce bras était déjà celui qui «cassait» dans Brice de Nice ; à la souplesse du surfeur répond ici la rigidité de l’espion, mais l’efficacité comique est à peu près égale. En France, on voit peu de comédiens capables de tenir un personnage avec cette seule aisance physique, cette prodigieuse manière de faire parler son corps plutôt que sa voix. Dans ce deuxième OSS 117, il est passionnant de voir comment par exemple, avant d’éclater de rire, le visage de Dujardin s’ouvre en une grimace d’inquiétude et de perplexité, sans qu’on sache s’il s’agit de retenir le fou-rire à venir ou s’il y a là une hésitation quant à savoir si ce que dit son interlocuteur est drôle ou non. Dujardin explique qu’entre le premier et le deuxième épisode, «le personnage ne m’a pas quitté pendant trois ans». Et il ajoute : «J’ai l’impression de moins poser que dans le premier où j’étais encore dans la fabrication du personnage.» En effet, Hubert Bonisseur de la Bath version 1967-2009 est moins guindé que celui de 1955-2006. Et pas seulement parce qu’au cours d’une incroyable partouze sur la plage, il acceptera une main dans son précieux fondement — saillie cul impensable dans une comédie française familiale… Le film autorise surtout l’acteur à sortir de ses marques (au sens propre, tant la mise en scène est millimétrée dans ses cadres et ses lumières) pour afficher une élégante décontraction. L’humour devient parfois plus énorme, comme dans la scène de la découpe du crocodile — saillie gore impensable dans une comédie française familiale — mais Dujardin reste impérial. Au fil de la projection, on pensait, et ce n’est pas un mince compliment, à Ben Stiller et Adam Sandler. S’il continue à trouver des cinéastes à sa mesure, Dujardin est appelé à régner sur le cinéma populaire français pendant longtemps !
CC

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