Bronson

A l’aide d’un acteur principal habité et de circonvolutions esthétiques incroyablement maîtrisées, Nicolas Winding Refn nous démontre avec brio que oui, une biographie filmée peut avoir un point de vue dans sa mise en scène. François Cau

Le monologue introductif impose illico le personnage comme son traitement cinématographique. Toute sa vie, Michael Peterson a voulu devenir célèbre. C’est donc en habit de clown blanc qu’il vient commenter à son public imaginaire les différentes étapes de sa vie, avec une causticité des plus bourrines. Le braquage minable d’un bureau de poste, les années d’incarcération, ses coups d’éclat derrière les barreaux, l’interlude saisissant en HP, les émeutes et autres prises d’otages, sa courte libération (69 jours avant de retourner à l’ombre), son changement de patronyme lors de combats clandestins, l’enfer des cellules d’isolement… Bronson est une brute, une force de la nature conchiant toute forme d’autorité, aux motivations mal dégrossies, dont Nicolas Winding Refn livre sa propre vision kaléidoscopique. Le réalisateur ne propose aucune justification à la violence de ses actes, ne cède jamais à une empathie complaisante, mais crée un dispositif cinématographique complexe, puissamment sensoriel, un marabout-de-ficelle visuel dont le seul lien n’est autre que ce colosse imprévisible. Grande évasion
Bien loin de la crudité esthétique de la trilogie Pusher, le cinéaste enchaîne les séquences visuellement grisantes, pare ses plans d’une lumière clinique, sublimée par des compositions de cadres totalement kubrickiennes - l’émotion en plus. Car malgré la dureté de son sujet, de sa représentation à charge d’un système carcéral qui ne sait tout simplement pas comment gérer un réfractaire aussi radical à toute tentative d’assujettissement social, Bronson est un film dont l’ironie mordante fait mouche. Notamment grâce à la composition exceptionnelle de Tom Hardy dans le rôle principal – ex beau gosse insipide vu dans des naseries aussi anecdotiques que Rocknrolla, l’acteur, au-delà de son impressionnante métamorphose physique, assimile parfaitement le style du film et livre une performance sur la corde raide, qu’on pourrait définir comme du cabotinage sobre ! Jusque dans la pseudo rédemption artistique de son personnage dans le dernier acte, Refn et Hardy nous dévoilent, couche par couche, la construction d’un alter ego voué à exploser toute limite, toute convenance - déjà que dans la forme, Bronson s’avère gonflé, le film a en plus le culot de se targuer d’un fond particulièrement subversif. Comment une anomalie du système finit par devenir son pire cauchemar, voire son plus monstrueux reflet… Bronson
De Nicolas Winding Refn (GB, 1h32) avec Tom Hardy, Matt King…

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