À l'occasion, samedi 20 octobre, de la première édition des soirées "Let's dance" avec Honey Soundsystem, Alban Sauce, responsable de la programmation musiques électroniques de la Belle électrique, revient avec nous sur ce nouveau concept de soirée et ce qu'il laisse augurer pour la suite, mais aussi plus largement sur ses choix (et contraintes !) de programmation.
Quel est le principe des soirées Let's dance qui vont débuter samedi 20 octobre avec Honey Soundsystem ?
Alban Sauce : L'idée, c'est avant tout d'avoir des événements dédiés aux musiques de groove, aux musiques qui font danser. D'être moins sur un truc très basique techno/house pour aller vers plus d'ouverture, et mettre en lumière des artistes, comme on a pu le faire déjà avec Hunee et comme on va le faire en décembre avec Antal, qui sont hyper transversaux et vont jouer à la fois de la house, du zouk, des trucs complètement différents dans leur set, tout en gardant une cohérence. Bref, des artistes dont le seul objectif est de faire danser les gens.
Je pense que pendant de nombreuses années, dans la techno, on a perdu un peu cette notion de groove, et j'ai l'impression qu'aujourd'hui, grâce notamment à ce qui se passe à Amsterdam avec des artistes comme San Proper, Hunee ou encore Antal, on y revient un peu. Du coup, l'idée de départ, c'était tout simplement de présenter ça au public grenoblois et d'avoir un moment moins focalisé sur l'artiste lui-même, et plus sur la musique qu'il passe, le groove qu'il met, le côté un peu festif... Créer une bulle d'air, un endroit où il y ait du lâcher-prise...
Par quels moyens ?
Déjà, on va faire une scénographie un peu spécifique sur chaque date, où l'on repense l'utilisation de la salle : on va limiter la jauge à 600 personnes, le DJ sera dans la fosse, on ne va pas utiliser le bar du haut, les gradins, la partie mezzanine, on va utiliser l'autre bar et créer une nouvelle circulation... Ce n'est pas juste "on utilise la Belle de manière classique, et puis on y met des DJs différents", on veut créer un truc autour, avec une boule à facettes, tout un décorum...
Là, sur les premières, on va tester des choses, mais à terme, l'objectif est que les gens nous fassent confiance sur le nom Let's dance et qu'on puisse créer une couleur musicale autour, mettre en avant des artistes qui sont plus de l'ordre de la découverte, qui ne sont pas des gros headliners. Et au-delà de la proposition artistique, on veut vraiment créer un truc un peu "communauté"... L'idée est de revenir aux bases essentielles de la house, le coté Chicago, Frankie Knuckles, et refaire vivre ça aussi aux jeunes générations qui ne l'ont pas connu.
« L'idée est de revenir aux bases essentielles de la house »
Ces nouvelles soirées s'inscrivent-elles dans un contexte plus large ?
En fait, on va développer trois types d'événements différents : évidemment, on va continuer ce qu'on fait déjà très largement, à savoir programmer des têtes d'affiche. On a eu Boys Noize, on va avoir Ellen Allien, Étienne de Crécy, des choses très classiques pour lesquelles il y a une vraie demande...
Et après, développer deux concepts : Let's dance sur les musiques de groove, et Now Future, qui est dédié aux artistes émergents de la scène électronique où l'on sera plus sur de la techno avec un côté un peu mécanique, des musiques un peu industrielles... Pour la première, on a eu Dax J et Antigone, et la prochaine, ça sera Avalon Emerson, Or:la et Roi Perez. Donc voilà, on a ces deux concepts qui vont jalonner toute la saison, et j'espère, à terme, se développer sur un temps un peu plus long, parce que c'est vraiment quelque chose dans lequel j'ai envie de m'investir.
Pour quelles raisons ?
Le problème aujourd'hui, c'est qu'on est sur une programmation où l'on ne fait quasiment que de la tête d'affiche, et je trouve que ce n'est pas hyper intéressant en tant que programmateur de s'en contenter. Bien sûr, il y a un côté "challenge" qui est rigolo, parce que choper des gros noms comme on le fait, c'est cool, et j'en suis plutôt fier, mais après, notre rôle, en tant que programmateur et en tant que future Smac, c'est aussi de faire découvrir de nouveaux artistes, de déterminer quelle va être la scène de demain, comment tout ça évolue...
Mais pour ça, il faut aussi qu'on aide les publics, qu'ils comprennent notre démarche, et là direction où on veut aller. D'où l'idée de créer des "marques" de soirées pour que le public puisse se dire : ok, ça, ça ressemble à ça, ça, ça ressemble à ça, et je vais pouvoir trouver mes marques là dedans.
Et puis ce qui est important pour nous aussi, c'est la question des culture électroniques et numériques, et de tout ce qui tourne autour : comment on va créer une communauté, des interactions, autour de ces événements. On veut vraiment créer un truc un peu "familial", communautaire, "tous ensemble" comme on l'avait autrefois... Et qu'on perd un peu aujourd'hui avec l'individualisation de la société.