Un professeur d'université pleutre, chauve et bedonnant se met à apparaître sans raison dans les rêves des gens, sans interaction particulière avec le rêveur — du moins dans un premier temps. Phénomène inexpliqué et arbitraire scénaristique : déjà à la vision de son précédent Sick of Myself, on trouvait quelques airs de Quentin Dupieux au cinéma du Norvégien Kristoffer Borgli... C'est encore plus frappant ici, car à ce no reason s'ajoute une réflexion acide sur les vanités de la célébrité, surtout quand celle-ci vous tombe dessus par inadvertance. Fêté puis vilipendé par une population surconnectée, produit d'appel d'une nouvelle génération d'influenceurs, fétiche érotique, objet de culte (en France !), bouc-émissaire d'une population revancharde, cet homme sans qualité est brinquebalé d'un désir à l'autre sans l'avoir jamais sollicité, suscitant un malaise de plus en plus poisseux — la scène du canapé est un sommet de glauquerie sexuelle.
La grande idée de Borgli, en plus de sa capacité à représenter les rêves dans toute leur horrible banalité, c'est d'avoir confié ce rôle de type normal au moins normal des acteurs : Nicolas Cage. Son expressionnisme habituel se retrouve ici coulé dans le plomb de son archétype. L'expérience est concluante : on le sent toujours à deux doigts de déchirer son costume et jeter ses postiches pour exploser de rage et de naturel. Borgli le lui autorise le temps d'une confession online que son entourage va lui faire immédiatement regretter, ultime déchéance où le pathétique submerge le ridicule. Face à une réalité si décevante, ne reste plus que le rêve (sponsorisé) pour se consoler.
Dream Scenario
De Kristoffer Borgli (EU, 1h43) avec Nicolas Cage, Julianne Nicholson, Michael Cera...
Sortie le 27 décembre