À savoir les guérilleros post-rock du label canadien Constellation (A Silver Mount Zion, Godspeed You Black Emperor).A priori, on ne trouve guère de mariage plus improbable que celui-ci. D'un côté, le folkeux recroquevillé au verbe noir. De l'autre, les dynamiteurs d'un rock aussi lyrique que versé dans le mutisme. Autrement dit, la carpe et le lapin en route pour une improbable noce. Le Nord et le Sud montés au front pour un «Gettysburg» sonique.
La rencontre a lieu sous l'égide de Jem Cohen, ami commun réalisateur qui produira l'album, certain que ces deux univers antinomiques puisent leur énergie dans le même fossile. On avait déjà vu Chesnutt flirtant avec le rock viril sur certains morceaux, ou avec Brute, projet parallèle initié par le passé avec le groupe Widespread Panic. Tout comme on l'a toujours connu ouvert aux collaborations prestigieuses et aux idées venues d'ailleurs (Kurt Wagner, Emmylou Harris). Mais jamais il n'avait atteint une telle intensité, évacuant d'un seul coup toute sa discographie passée, morte et ressuscitée simultanément dans les flammes orageuses du Silver Mount Zion.
Mais si la patte Constellation a secoué l'inspiration de Chesnutt, on ne peut pas s'empêcher de penser que l'intensité du petit Vic a considérablement assaisonné les compositions parfois ronronnantes de cette avant-garde post-rock.
Le concert de l'Épicerie moderne, où les Canadiens seront là en force, achèvera sans doute de démontrer que loin d'être fortuite cette rencontre tellurique relève finalement de l'évidence la plus absolue. SD«North Star Deserter» (Constellation/Differ-ant)