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Galeries à creuser

Galeries à creuser

Expos / Portrait, paysage, nature morte : autant de genres classiques réinvestis par les artistes contemporains. Et ce avec inquiétude, doute ou... ironie. Nous vous en proposons ici quatre exemples, sous forme de petite balade visuelle parmi quelques-unes des bonnes expositions d'été des petits lieux d'art lyonnais...Jean-Emmanuel Denave

En préfiguration au prochain grand rendez-vous de la photographie (Lyon Septembre de la Photographie du 15 septembre au 31 octobre avec une soixantaine d'artistes et une vingtaine de lieux autour du thème des «Identité(s)»), le Bleu du Ciel, en collaboration avec le Musée de l'Elysée à Lausanne, présente une exposition consacrée au nouveau portrait photographique contemporain. Genre artistique usé jusqu'à la corde, le portrait vise ici moins à atteindre des buts esthétiques ou psychologiques, qu'à effectuer une sorte d'état des lieux politique, sociologique, techno-scientifique, des transformations et des mutations en cours de l'identité humaine, des identités humaines. Avec une place importante ménagée au doute, aux nouveaux masques du numérique, des biotechnologies et de la surexposition au tout visuel... Nous sommes accueillis à la galerie par trois grands visages de GI's américains ayant participé aux guerres d'Afghanistan et/ou d'Irak. Visages mélancoliques et clos sur eux-mêmes, couchés au sol par Suzanne Opton dans une sorte d'abandon et de fragilité peu courants chez des militaires entraînés à tuer. Plus loin, un visage boursouflé, indéfinissable, inquiétant, émerge quasiment en tremblant d'un halo obscur. Grâce à une technique complexe de pose longue et d'éclairages successifs à la lampe de poche, Gary Scheider a réussi à représenter ce qu'il appelle «une accumulation d'expressions» : superpositions de différentes expressions de son modèle féminin qui disent l'impossibilité, ou du moins la grande difficulté de représenter le visage humain, son inatteignable synthèse. C'est ce même type de geste artistique, tout à la fois critique, utopique et troublant, que tentent Noah Kalina avec son impressionnant diaporama de 2356 autoportraits pris quotidiennement entre 2000 et 2006 (travail toujours en cours), ou Chris Dorley-Brown en réunissant sur une même image les deux mille visages des habitants d'une petite ville anglaise.Du visage au paysage
Parmi beaucoup d'autres propositions insolites ou réflexives exposées au Bleu du Ciel, on retiendra encore cette image de Sara Leen où l'on voit les deux mains d'une actrice tenant le masque en silicone de son propre visage. La réalité de la face humaine disparaît cette fois-ci complètement au profit de son simulacre, verso ou faciès artificiel enveloppé dans les mains du réel... C'est aussi à mi-chemin entre le réel et l'artificiel, la nature et les humaines élucubrations (techniques, touristiques, urbaines...) que se situe le travail photographique de Beatrix Von Conta présenté à la galerie Le Réverbère. Nous ne sommes plus avec elle dans le domaine du portrait mais dans celui du paysage que, depuis des années, l'artiste scrute avec une extrême précision, «attend», embrasse du regard. « L'expérience du paysage, vécue souvent comme un loisir sans conséquences, glisse vers une aventure inattendue dès que l'on accepte que derrière les apparences du visible se tapissent les ombres de la civilisation et les peurs enfouies de l'enfance. Le paysage pousse sur le terreau fertile de notre imaginaire » écrit-elle. Parmi ses trois séries exposées, citons notamment «Coupures/reprises» réalisée à Beauvais en 2007 : un ensemble de vues urbaines fractionnées, de «non lieux», d'espaces sans qualité et vides de présence humaine, de fragments d'une ville échappant à toute totalisation... Quelques signes, quelques pans de murs, quelques rues sans issue, un tas de gravats esseulé devant une haie verte, qui, pris ensemble, composent une sorte de labyrinthe imaginaire, font basculer la banalité et la familiarité de la ville dans une sorte d'étrange et troublante vacuité...Faire mouches
La ville, le jeune plasticien Nicolas Moulin est capable de la transformer en véritable cauchemar : on l'avait découvert à Lyon avec une série d'images retravaillées à l'ordinateur, représentant des rues de Paris désertes et aux fenêtres d'immeubles murées... Ville fantôme. Adepte du grand écrivain de science-fiction Philip K. Dick, l'artiste revient à la BF15 présenter trois œuvres récentes dont une étonnante vidéo en 3D nous plongeant au sein d'une étrange et monumentale architecture, balayée par intermittence par une lumière blafarde. «Désormais, avec la technologie numérique, plusieurs réels cohabitent et se font concurrence. L'officiel et une infinité d'autres, les «réalités officieuses. Je crée des simulacres, des mondes parallèles, et je leur donne une fausse authenticité», déclare Nicolas Moulin dans une interview... À la galerie Olivier Houg, Ivan Fayard s'attaque quant à lui à un autre genre classique en art : la nature morte et la vanité. Ses toiles d'apparence purement esthétique, flirtant même avec l'Op'art, sont en réalité composée de nuées de mouches peintes avec les doigts (la mouche était couramment utilisée dans la peinture classique comme symbole de vanité). Les ondes, les jolis cercles concentriques ou les constellations d'étoiles d'Ivan Fayard à la fois se maintiennent et tombent comme des mouches. Ironie, mise en abîme de l'histoire de la peinture, jeux métaphysiques : autant d'éléments qui parsèment l'œuvre mystérieuse et toujours à double-fond de l'artiste. "Identité(s) : faire faces"
au Bleu du Ciel jusqu'au 19 juillet (et du 3 au 13 septembre)Beatrix Von Conta
au Réverbère jusqu'au 26 juilletNicolas Moulin
à la BF15 jusqu'au 26 juilletIvan Fayard, "L'ombrelle n'est pas une fleur"
à la galerie Olivier Houg jusqu'au 26 juillet

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