La nature inhumaine
Rencontre / Mariette Job sera jeudi à la librairie Decitre pour présenter le Journal d'Hélène Berr, un témoignage inédit que cette jeune étudiante juive a tenu à Paris entre 1942 et 1944. Bouleversant.Yann Nicol

Arrive ensuite le mois de juillet et les terribles rafles du Vélodrome d' Hiver, qu'Hélène vit de très près puisqu'elle est depuis quelque temps bénévole pour l'Ugif, l'Union générale des Israélites de France. Le journal s'interrompt alors pendant presque un an. Une année, dont on devine alors qu'elle fut terrible, et qui conforte la jeune femme dans son désir d'écrire, de rendre compte, de nommer, de témoigner." Car comment guérira-t-on l'humanité autrement qu'en lui dévoilant d'abord toute sa pourriture, comment purifiera-t-on le monde autrement qu'en lui faisant comprendre l'étendue du mal qu'il commet ? Tout est une question de compréhension ", écrit-elle le 10 octobre 1943. Plus le temps passe, et plus l'étau se resserre. Hélène et ses parents sont contraints de déserter leur maison, avec la certitude que leur tour viendra bientôt. Les dernières pages du Journal sont écrites le mardi 15 février 1944, un mois avant qu'elle ne soit arrêtée et internée à Auschwitz. On y lit notamment ces mots : "Je souffre en pensant à la souffrance des autres. S'il n'y avait que moi, tout serait si facile. Je n'ai jamais pensé à moi, et ce ne serait pas maintenant que je commencerais. Je souffre de la chose en elle-même, de cette monstrueuse organisation des persécutions, de la déportation en elle-même ". Morte à Bergen-Belsen en 1945, quelques jours seulement avant la Libération, Hélène Berr laissait derrière elle ce journal poignant, que le grand public peut désormais découvrir grâce à cette publication inédite. Une lecture à la fois terriblement éprouvante et absolument nécessaire.Mariette Jobà la librairie DecitreJeudi 12 juin à 17h30