Les films à voir absolument en 2024

Rentrée cinéma / Les six mois à venir sur les écrans s’annoncent riches et variés, avec l’arrivée de quelques blockbusters ambitieux décalés par la grève hollywoodienne, une solide sélection française, des films oscarisables et du cinéma de genre et/ou d’auteurs venus de tous les continents.

Janvier et février sont traditionnellement les deux mois où déferlent sur les écrans les derniers candidats sérieux pour la saison des prix, queue de la comète avant le grand reset opéré aux festivals de Sundance et de Berlin. Deux sensations cannoises d’abord : May December (24 janvier) de Todd Haynes, tragi-comédie où une actrice (Natalie Portman) vient étudier le modèle qu’elle doit incarner (Julianne Moore), femme mûre ayant défrayé la chronique en entretenant une liaison avec un adolescent de 13 ans, qu’elle finira par épouser. Après le beau mais consensuel Dark Waters, Haynes revient sur des terres plus familières : une réflexion d’une ironie dévastatrice sur les faux-semblants, les désirs interdits et les dommages humains que les deux entraînent.

Deuxième choc : La Zone d’intérêt (31 janvier), quatrième film de l’immense Jonathan Glazer (Birth, Under the skin) et Grand Prix à Cannes, où il adapte feu-Martin Amis pour montrer le quotidien banal de Rüdolf Hess et de sa femme (tous deux incarnés avec une terrifiante crédibilité par Christian Friedel et Sandra Hüller) dans leur maison aux abords du camp d’Auschwitz. Ledit camp dans le film n’est qu’un bruit de fond renvoyant autant à l’indifférence des bourreaux qu’à la nôtre face aux tragédies en cours. La mise en scène joue ce jeu du présent pur et du hors-champ dérangeant pour un résultat vraiment inoubliable, une expérience provocatrice et secouante. Andrew Haigh a beau avoir fait un sans-faute (Week-end, 45 ans, La Route sauvage), ce cinéaste anglais reste encore peu connu du grand public. Les choses risquent de changer avec le bouleversant Sans jamais nous connaître (14 février) où Haigh, tout en restant fidèle à son goût du mélodrame sentimental, l’étire dans des directions spectaculaires et inattendues. Remarquable dans ses audaces formelles et merveilleusement porté par son quatuor d’acteurs (Paul Mescal, Jamie Bell, Claire Foy et surtout Andrew Scott, candidat sérieux à l’Oscar), le film manipule les émotions du spectateur (rires, larmes, frissons) comme des atomes en fusion et ose l’artifice pour viser la vérité. Outsider par rapport aux trois titres précédents, Iron Claw (24 janvier) devrait créer la surprise. Son réalisateur, Sean Durkin, fut une victime collatérale du COVID quand son deuxième film, le génial The Nest avec Jude Law et Carrie Coon, fut envoyé directement dans les bas-fonds des plateformes VOD. Pour ce troisième long, il emmène Zach Efron sur les rings de catch dans les années 80. On peut compter sur Durkin, aussi exigeant styliste qu’excellent auteur, pour donner à cette matière ingrate la densité cinématographique nécessaire.

Sables mouvants cinématographiques

La grève des scénaristes et des acteurs américains a décalé la sortie de quelques films très attendus, à commencer par la deuxième partie de Dune (28 février) toujours signée Denis Villeneuve. Loin d’être fans du premier volet, avouons tout de même notre excitation pour découvrir la suite, notamment grâce à ses ajouts de casting (Florence Pugh et Léa Seydoux, rien que ça) et l’arrivée des vers des sables, attraction foraine de cette suite promise au carton planétaire. À l’échelle de ce blockbuster, le premier essai en solo d’Ethan Coen sans son frangin Joel, parti de son côté filmer du Shakespeare, tient de la miniature. Drive-away dolls (10 avril) revendique d’ailleurs son statut de série B, première d’une trilogie mettant en scène des lesbiennes vénérs, hommage assumé au cinéma topless de Russ Meyer et aux films de drive-in. En mai, pendant que Cannes battra son plein, George Miller tentera le hold-up de l’année avec Furiosa (22 mai), préquel de son Mad Max Fury Road recentré sur le personnage incarné par Charlize Theron, ici réincarné jeune en Anya Taylor-Joy - joie, en effet ! Dernier effort américain à suivre : un préquel là encore, mais à la série horrifique Sans un bruit. Sobrement intitulé Jour 1 (28 juin), ce troisième épisode voit John Krasinski passer la main derrière la caméra au jeune Michael Sarnoski, auteur du prometteur Pig avec Nicolas Cage.

L’Empire français contre-attaque

Tout en gardant comme d’habitude ses éléments majeurs pour le festival de Cannes, le cinéma français envoie sur le terrain quelques cinéastes plutôt capés. C’est Bruno Dumont qui ouvre le bal avec L’Empire (21 février), où il retrouve sur grand écran les deux flics de sa série P'tit Quinquin, ici propulsés dans un univers de SF façon Star Wars de la côte d’Opale, si cela veut dire quelque chose… Improbable aussi, la rencontre entre Blanche Gardin et Michel Houellebecq devant la caméra de Guillaume Nicloux pour Dans la peau de Blanche Houellebecq (13 mars). Nicloux boucle (?) ici une trilogie avec l’écrivain-acteur (??) tout en essayant d’égaler le record de productivité de Quentin Dupieux (trois films sortis en douze mois). Photo finish à l’arrivée car Dupieux présentera le 7 février sur les écrans Daaaaaali ! Comptez le nombre de « a » du titre pour savoir combien d’acteurs y incarnent le peintre espagnol surréaliste dans ce film-gigogne dont le cinéaste est devenu le maître incontesté. Enfin, notons deux réalisateurs aimés au programme de cette rentrée : Stéphane Brizé, qui revient à la veine intimiste de Mademoiselle Chambon et Quelques jours de printemps pour Hors saison (20 mars) avec un couple inattendu : Guillaume Canet et Alba Rohrwacher ; et Bruno Podalydès, déjà de retour un an après le très réussi Waouh avec La Petite vadrouille (6 juin), récit d’arnaque renoirienne sur un bateau de croisière. Daniel Auteuil vient y grossir les rangs de la troupe Podalydès, et c’est un motif de curiosité supplémentaire.

Universal cinema

Que se passe-t-il dans les restes du monde, comme on dit au Groland ? De très belles choses, et une tendance à hybrider le cinéma de genre avec des formes personnelles et innovantes. Ainsi du superbe Universal Theory (21 février) de Timm Kröger, où ce jeune cinéaste allemand de 37 ans empoigne la mode du multivers pour l’envoyer dans un film d’Hitchcock, fusionnant cinéma classique et fantasy geek, méditation historique et pur plaisir esthétique. Au Québec, Ariane Louis-Seize mélange film d’horreur, teen movie et comédie dans Vampire humaniste cherche suicidaire consentant (20 mars). Le film rafle tout sur son passage depuis sa présentation à Venise, il devrait faire des étincelles lors de sa sortie française. Horreur encore, mais venue de Corée avec Sleep (21 février) de Jason Yu. Cet ancien protégé de Bong Joon-ho signe son premier long avec cette histoire flippante où un mari somnambule terrorise femme et enfant. Un film remarqué à la Semaine de la critique cannoise, section où fut sacré Tiger Stripes (13 mars) de la Malaisienne Amanda Nell Eu, qui joue aussi à la frontière du fantastique et de la métaphore en montrant la puberté « monstrueuse » d’une jeune fille de 12 ans dans une communauté rurale. Enfin, terminons par une bonne nouvelle venue d’Argentine. Dans la lignée des films du Pampero Cine (La Flor, Trenque Lauquen), Rodrigo Moreno propose dans Los Delincuentes (27 mars) un récit qui part dans tous les sens et prend ses 190 minutes pour vagabonder entre film de casse, film de prison, romance érotique et errance existentielle avec un seul mot d’ordre, salvateur par les temps qui courent : ne travaillez jamais !

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