Livres sans frontières

Le festival Parole Ambulante, qui sera notamment consacré à la littérature du Québec, et une rencontre à la Villa Gillet autour d’écrivains français et de critiques anglo-saxons montrent que les œuvres littéraires peuvent parfois traverser l’Atlantique. Et pas toujours dans le même sens… Yann Nicol

Alors que les lecteurs français s’enthousiasment lors de cette rentrée littéraire sur les romans des Britanniques Ian McEwan et Hanif Kureishi, ou des Américains Thomas Pynchon et Richard Ford, on est bien obligé de reconnaître que l’engouement n’est pas forcément partagé par nos «amis anglo-saxons», comme on dit en sport et en politique. Car nos amis Américains et Anglais n’ont que faire des derniers livres de Christine Angot ou Jean-Paul Dubois. Lisent-ils seulement J.M.G Le Clezio, fraîchement distingué du Prix Nobel de littérature ? Pas si sûr… En mettant en place des résidences de spécialistes venus de Grande-Bretagne ou des États-Unis pour traduire des auteurs français, la Villa Gillet permet à certains romanciers de traverser l’Atlantique et de se faire connaître du public américain : mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il faut ramer… La rencontre qui aura lieu mardi à la Villa Gillet réunira trois écrivains dont l’œuvre sera bientôt traduite. Ils seront confrontés à des critiques littéraires du monde anglo-saxon : l’Américain Eric Banks et la Britannique Lucy Dallas, qui est responsable du prestigieux supplément littéraire du Times. Le premier d’entre eux, le Mauricien Barlen Pyamootoo, présentera son troisième roman, Salogi’s (L’Olivier). Dans ce court texte autobiographique, celui qui est aussi cinéaste revient sur le destin de sa mère, Salogi, disparue trop tôt : un livre intime sur une histoire familiale mouvementée, que l’auteur décrit dans une langue incarnée et sensuelle, d’une simplicité saisissante. Les deux autres sont Nicolas Texier, pour la parution de son deuxième roman, Pôle Sud (Gallimard) et l’excellente Julie Wolkenstein, qui publie avec L’Excuse l’un des livres les plus fascinants de cette rentrée littéraire, autour d’une mise en résonance passionnante entre l’histoire déroulée par l’auteur et Portrait de femme, le grand roman de Henry James. Un pont de plus entre les littératures françaises et anglo-saxonnes…Québec, France, Mali : poésie sans frontières
Les liens sont sans doute naturellement plus étroits avec la culture québécoise. La ville de Québec, fondée en 1608 par Samuel de Champlain «à l’endroit où le fleuve se resserre» sera à l’honneur, pour ce 400e anniversaire, de la 13e édition du festival Parole Ambulante. À cette occasion, l’Espace Pandora présentera d’ailleurs un ouvrage intitulé Amérique, Amériques (La passe du vent / L’instant même), dans lequel on retrouve une anthologie de textes anciens (écrits aux XVIe et XVIIe siècles au moment de la découverte des populations amérindiennes par les Européens) et d’œuvres récentes. La soirée du 22 octobre, en clôture du festival, fera la part belle à ce livre et aux auteurs contemporains qu’on y retrouve : Éric Dupont, Jean-François Poupart, Kim Doré ou Carole David. D’autres, comme Renée Gagnon, Catherine Lalonde ou Mylène Lauzon, seront pour leur part présents lors de la soirée d’ouverture, le 14 octobre au Théâtre Les Ateliers, pour un spectacle avec Slam, projections, performances et musique. Un spectacle réalisé sous la direction artistique de l’intrigante D.Kimm, artiste à l’œuvre éclectique qui est notamment à l’origine du festival Voix d’Amériques, consacré aux modes de mise en voix de la poésie. Côté «patrimoine», un hommage sera également rendu au poète Gaston Miron et à son œuvre, L’Homme rapaillé, dans un spectacle où les mots de cet immense poète de l’Amérique française seront mis en résonance avec l’œuvre d’un écrivain français particulièrement influencé par la littérature américaine, qui est aussi le parrain du festival : Emmanuel Merle (voir entretien). Notez enfin que le continent africain sera aussi représenté par la présence de l’humoriste Fellag et du poète malien Moussa Konaté. Il n’y a pas que l’Amérique dans la vie…Festival Parole Ambulante
Du 14 au 22 octobre
«Vu d’ailleurs»
À la Villa Gillet
Mardi 21 octobre à 19h30