Rendez-vous dans l'espace

À moins d’être demandeur d’asile ou étudiant à la fac catho, c’est vrai, les gens se donnent assez peu rendez-vous place Carnot. Dommage, car pour peu que l’on suive le conseil de Marc Moulin et qu’on se donne rendez-vous dans l’espace (Carnot), on est à peu près sûr de passer un délicieux moment. Stéphanie Lopez

Ce n’est a priori pas le genre de resto pour lequel on traverserait la ville : coincé entre la Brasserie Victor Hugo et le Restaurant des îles, l’Espace Carnot n’aguiche en rien le gastronome en quête d’une ultime quenelle avant de prendre son train. Le cadre ordinaire, dans le traditionnel ton brasserie avec banquettes et boiseries, ne laisse en apparence que deux panneaux indicateurs de bonne pitance : un macaron de Monsieur Pneu et un autocollant des Toques Blanches.

On se penche sur la carte par acquit de conscience. OK, un menu lyonnais de bon aloi (œufs pochés en meurette, gâteau de foies de volaille, et donc l’indispensable quenelle d’avant gare), un menu gourmet pour qui n’aurait pas de train à prendre et ô ! joie, pour qui n’aurait que vingt euros pour casser le train-train, un menu du jour engageant. En ce dernier lundi d’été, les deux chefs ont tout misé mitonné côté mer : au Nord et en entrée, une soupe de moules de bouchot, au Sud et en plat principal, un thon mi-cuit zébré de pistou et flanqué d’une ratatouille niçoise.

La mer comme chez grand-mère

Première bouchée et déjà on se félicite de cette rencontre à l’improviste avec la cuisine de Roger Jaloux et Cyril Romero. Le diplôme de Meilleur Ouvrier de France et les quarante ans passés chez Bocuse sont bien plantés là au bout de la fourchette, dans ce thon rouge et moelleux à cœur, en parfait accord avec la ratatouille si fondante qu’elle semble confite, assurément mijotée de longues heures dans la marmite, peut-être touillée par Ratatouille lui-même.

Ici la, tradition se revisite mais les grandes spécialités de la maison (le magret de canard aux douze épices, les petits pots d’escargots aux tomates confites…) sortent pas peu fiers des grimoires de grand-mère. L’héritage s’annonce d’ailleurs jusque dans l’intitulé des desserts (crêpes Suzette, gaufres comme grand-mère…) Même si, pour notre part, c’est le soufflé glacé au Grand-Marnier qui nous fait revenir sur un vieil a priori : en fait on pourrait très bien traverser la ville rien que pour lui.

L’ESPACE CARNOT

4 place Carnot, Lyon 2e

(04 72 41 98 40)

Menus de 19, 90€ (midi) à 36€